Les carnets de la créations / France Culture
Plasticienne et illustratrice, Camille Lavaud pratique à la fois la réalisation de planches et d’affiches dessinées, l'installation, la création d'objets atypiques, la couture, la réalisation de livres illustrés de ses dessins et le montage vidéo. Elle puise son inspiration dans la musique, les photographies, les affiches de cinéma, les romans et les films, particulièrement les polars. Certains de ses dessins sont publiés dans des revues (Feuilleton, Citizen K...) ou édités, ainsi son premier livre Blocus Solus – en hommage à Locus Solus de Raymond Roussel – paraît chez United Dead Artists en 2012. En avril-mai 2015, elle présente l'exposition L'Art de la Mouise qu'elle présente à la librairie La Mauvaise Réputation à Bordeaux. Cette même année, elle réalise des planches dessinées ainsi qu'un dispositif animé autour de la vie et des écrits du philosophe Roland Barthes pour le festival Ritournelles. En 2016, elle a également travaillé à la charte graphique pour la nouvelle plateforme numérique du Frac Aquitaine.
Influencé à ses débuts par l'underground et la bande dessinée noire américaine, son travail est aussi riche de références à la culture populaire française. Depuis quelques années, ce sont les polars et le cinéma des années 1950-1960 qui nourrissent son œuvre. L’attachement de Camille Lavaud aux romans noirs lui vient de l'enfance, lorsqu'elle passait des journées entières à sillonner la Dordogne dans le bibliobus de son grand-père, y dessinant, entourée de livres policiers et romans dits « de gare ». Elle est aussi influencée par les répliques vives et gouailleuses des films du dialoguiste Michel Audiard et par le cinéma de Clouzot, Verneuil, Melville ou encore Bertrand Blier, qu'elle admire. Son univers est peuplé de bandits, prostituées, assassins et policiers rassemblés dans des saynètes dont les thèmes principaux sont la passion, l’argent et le crime. Ses dessins, très détaillés et aux couleurs acidulées, composent des histoires souvent rocambolesques et pleines d’humour. Au service d’une narration pleine de références, l’univers graphique de Camille Lavaud est prolixe, excessif, irrévérencieux et pétillant.
Le monde dépeint par Camille Lavaud est populaire, excessif et joyeux, souvent clinquant. Elle réalise à ses débuts des dessins essentiellement en noir et blanc puis opte pour la couleur, qu'elle veut énergique et vive, posée au feutre ou à l'encre. Le graphisme profus de chaque planche ou affiche, envahie de détails et motifs, amène notre regard à parcourir l'œuvre comme on suivrait le fil d'une narration, un peu comme face aux peintures médiévales.
Le Consortium des Prairies (2016) s'inscrit dans un projet plus vaste d'exposition d'une vingtaine d'affiches dans la gare Montparnasse (Paris) et la gare Saint-Jean (Bordeaux) en partenariat avec Gares & Connexions. Sont exposées au Frac Aquitaine onze de ces affiches. Cette série débute en 2013, lors d'une exposition à la librairie La Mauvaise Réputation, avec pour point de départ la création d'une affiche fictive pour le film Série noire d'Alain Corneau (1979) avec Patrick Dewaere. Ce travail de réalisation d'affiches illustrant des films imaginaires est ensuite poursuivi. Il devrait aboutir à la publication d'un ouvrage publié à l'occasion de l'exposition aux éditions United Dead Artists.
Dans cette série, chaque affiche est autonome, fonctionne autour d'un univers et d'une narration qui lui est propre. Partant du titre, inventé, du film, l'artiste produit une sorte de travail d'adaptation et de citation, largement ancré dans le champ des références au cinéma et roman noirs. Elle développe ensuite, au format standard des affiches, une illustration propre à créer une atmosphère cinématographique. Privilégiant, ici, les tons bleu-nuit et les valeurs sombres, l’atmosphère de ces affiches est crépusculaire et expressionniste. Le simulacre fonctionne et s’impose avec cohérence et efficacité. Les citations sont justes, humoristiques, aiguisées. Accompagnant cet ensemble d’affiches, deux caissons lumineux sont installés au mur et présentent la bande d’annonce fictive du film « La vie Souterraine », montage en boucle d’environ quatre à cinq minutes et réalisé à partir de différents photogrammes extraits de films.
Frac Aquitaine -2017